Francs-tireurs Bolbécais 1870-71

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  • Le 22/04/2016

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de gauche à droite

tombe 1

GEORGES LECUYER

ENGAGE VOLONTAIRE

CHASSEUR ECLAIREUR

MORT A ROUEN

LE 22 x 1870

A L’AGE DE 23 ANS

tombe 2

Abel DUPUIT 24 x 1870

Jn-Bte SALVAN   25 x 1870

Pierre LAINE 25 x 1870

Léopold COLLOS 30 x 1870

Auguste GIRARD 2 Jer 1871

Jean-Marie VIEL 12 Jer 1871

tombe 3

Pierre PINOT 12 Jer 1871

Felix PAJOT 20 Jer 1871

Pierre  BALLU 21 Jer 1871

Jules BOTANTUIT 12 FEVRIER 1871

Camille GAGNOLET 21 MARS 1871

tombe 4

PAUL CAUFOURIER

AGE DE 21 ANS ET 6 MOIS

ENGAGE VOLONTAIRE

AUX FRANCS TIREUS DE BOLBEC

MORT SUR LE CHAMP D’HONNEUR

A ST ROMAIN DE COLBOSC

LE 17 JANVIER 1871

CEUX QUI PIEUSEMENT SONT MORTS

POUR LA PATRIE

ON DROIT  OU A  LEUR CERCEUIL OU A

LA FOULE VIENNE ET PRIE

DE PROFUNDIS

COMMISSARIAT DE POLICE DE BOLBEC

PROCES-VERBAL

 

L’an mil neuf cent vingt huit

Le trois août à 17 heures ;

Nous, Le Bail Marcel

Commissaire de Police, en résidence à Bolbec, Officier de Police Judiciaire, Auxiliaire de Monsieur le Procureur de la République ;

Vu la décision du conseil municipal de la ville de Bolbec en date du 10 novembre 1927 ;

Nous sommes transporté au cimetière de Bolbec et en présence de M.M. Deshamps, maire, Chevalier de la Légion d’Honneur ; Deshayes,  premier adjoint, officier d’académie, suppléant du Juge de Paix ; et Régnier, 2ème adjoint, Croix de Guerre ;

Avons fait exhumer dans le cimetière militaire, et à droite en entrant.

Toutes les opérations ont été faites avec le respect dû à la mémoire des morts.

De ce que dessus, avons dressé le présent procès-verbal qui sera transmis à Monsieur le Maire de Bolbec.

Fait à Bolbec, le même mois, jour et au que dessus.

 

Signé : Le Bail

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Mont-St-Aignan, 30 rue Ed. Fortier,

Le 4 septembre 1928

 

En se rendant, la semaine dernière, sur la tombe de son frère héros de 1870, inhumé, avec quelques compagnons d’armes, au cimetière de Bolbec, ma mère septuagénère a été fort émue de ne plus trouver trace de sépulture, et non moins légitimement étonnée d’apprendre que le transfert des corps et des pierres tombales avait été effectué près de l’emplacement du monument aux Morts de la guerre de 1914-1918, sans que ni elle ni moi n’ayons été prévenus de quoi que ce soit.

Que la Municipalité bolbécaise ait eu d’excellentes raisons pour adopter cette mesure, je veux bien le croire ; que le dit transfert ait été opéré avec tout le soin et le respect que demandait la circonstance, nous voici forcés de le croire… Mais qui se tiendrait pour satisfait de savoir que les mains mercenaires et nécessairement indifférentes aient touché à ses morts hors de sa présence ? On devait, à notre avis, s’enquérir des membres de la famille de ces défauts : le père de mon oncle, M. Lécuyer, mort il y a 25 ans, était fort connu à Bolbec, les personnes, intimes ou non, qui le connurent sont encore nombreuses, et il était facile de savoir que ma mère, ma sœur et moi existons à Rouen.

Je me crois donc en droit de vous adresser une plainte motivée, à mon avis, sur la façon désinvolte de procéder de la municipalité bolbécaise et désirerais savoir si une enquête a été faite dans le sens indiqué plus haut comme je désirerais avoir communication et copie du procès-verbal d’une exhumation à laquelle nous devions, et pour raison légale et pour raison de cœur, assister en personne.

Dans l’espoir de recevoir prochainement tout « apaisement » désirable, je vous prie, Monsieur le Préfet, d’agréer mes respectueuses salutations

 

Signé : G. Diard

Professeur au Lycée Corneille

Prést du Synd. D’initiative.

Secrétaire Général de l’aide aux F. N.

 

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M. Diard

Professeur au lycée Corneille

30 rue Ed. Fortier

Mt-St-Aignan

 

J’ai l’honneur de vous accuser réception de votre lettre du 4 7bre courant relative à l’exhumation du corps de notre oncle dans le cimetière de Bolbec en vous faisant connaître que je fais procéder à une enquête sur cette affaire.

 

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Préfecture du département de la Seine-Inférieure

7 sept. 1928

Bolbec – Tombes de 1870-71

 

M. le Maire

 

Je vous communique, pour renseignement, rapport et avis, une plainte de M. Diard au sujet de l’exhumation du corps de son oncle, soldat de 1870-71, qui aurait été exhumé sans que la famille soit prévenue par la municipalité de Bolbec  ./.

 

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Cimetière de Bolbec - Famille LECUYER

 

 

15 septembre 1928.

 

Monsieur le Sous-Préfet,

            Lorsque M.M. DESHAYES et REGNIER, comme Adjoints, et moi-même comme Maire, nous nous vîmes confier l’Administration de la Ville de Bolbec, nous avons trouvé le cimetière en un état lamentable – chemins inexistants ou mal entretenus, ronces et même arbustes partout. Nous avons fait enlever près de cinq cents tombereaux de détritus de toutes sortes.

            Partisans convaincus du respect et du culte des morts, notre attention fut attirée sur ce que des tombes du cimetière militaire 1914-1918 n’étaient point recouvertes de pierres tombales.

            Nous avions résolu, dès que l’état de nos finances nous le permettrait :

            1° de faire procéder à la pose de pierres gravées au nom du soldat mort, sur les tombes qui en étaient démunies

            2° de ramener dans ce cimetière militaire où dorment les restes des héros de 1914-18, tous ceux qui reposaient dans le cimetière communal, morts pour la France à une date antérieure, et ce pour rendre un honneur égal à tous les enfants de Bolbec et à ceux des enfants de France, quel que soit leur département d’origine, que le glorieux trépas au combat y avait conduits à leur dernière demeure.

            De ce nombre, notamment,  étaient le Général RUFFIN, volontaire de 1792, mort à l’ennemi, et les vaillants soldats de 1870-1871 tués à Bolbec ou dans les environs.

            L’état des finances de notre petite cité nous oblige de procéder par étapes.

            Lorsque le cimetière communal reprit sa décence et que le cimetière militaire retrouva la dignité convenable et nécessaire, nous demandâmes aux représentants des anciens soldats et combattants de 1914-18 ce qu’ils pensaient de notre idée :  ils l’approuvèrent de tout cœur.

             Les quelques survivants de la guerre 1870-71 voulurent bien même nous féliciter officiellement, au nom de leur association.

            Etre tombé pour la France il y a un siècle, un demi-siècle ou actuellement, semblait, pour la Municipalité de Bolbec, présenter le même suprême sacrifice et digne des mêmes attentions et respects des générations présentes et à venir.

            L’an dernier, nous avons fait faire le transfert des restes du Général Ruffin, et cette année celui des restes de 1870-71.

            Les pierres qui recouvraient les tombes de ces derniers étaient, pour la plupart, en mauvais état ; l’entourage n’existait, pour ainsi dire, plus, et cela s’explique si l’on songe aux années écoulées, à ce que le terrain était en pente, au bord d’un chemin avec un mauvais écoulement des eaux.

            Ces tombes ont été transférées dans le cimetière militaire immédiatement à droite en entrant. Nous avons fait réparer toutes les pierres, refait les scellements et un entourage convenable, et j’ajoute que, d’ici peu, les noms gravés dans ces pierres, actuellement peu apparents, seront regrattés et peints.

            Le 1er novembre 1927, au cimetière militaire, lors de l’hommage rendu, Municipalité en tête, par toutes les Sociétés patriotiques, corps constitués, fonctionnaires, élèves des écoles conduits par leur maîtres et maîtresses, et une foule de Bolbécais, je pris la parole et annonçai, devant les tombes, que j’espérais pour 1928, voir réunis les restes des morts 1870-71 à ceux des morts de 1914-18 et à ceux du Général Ruffin que nous venions de transférer.

            Cette année-là, Monsieur Guillemard, fondateur et secrétaire de l’Association des Anciens Combattants de 1870-71, qui, à cause de ses 80 ans, ne pouvait plus assister aux réunions patriotiques, y vint, conduit en automobile par mes propres soins. Il voulut bien me dire que ses camarades approuvaient, non sans émotion, mon projet, parce que, nous disparus – me dit-il, - et nous ne sommes plus que sept, ce sera probablement l’oubli comme cela l’avait été pour le Général Ruffin.

            Ne connaissant plus d’ascendants ni de descendants des morts de 1870-71 et mes adjoints étant de même, bien que j’habite Bolbec depuis près de 75 ans, nous avons pensé que le fondateur et secrétaire de l’association de 1870-71 pourrait nous renseigner. Consulté à ce sujet, Monsieur Guillemard me répondit qu’ayant, lui aussi, toujours habité Bolbec, il n’en connaissait plus, et qu’il se renseignerait pour savoir si nos mémoires ne nous faisaient point défaut. Il me fit savoir plus tard que ses recherches avaient été négatives et qu’il n’avait pu avoir connaissance d’aucune adresse de parents directs ou collatéraux.

            Le 10 novembre 1927, en séance publique du Conseil Municipal, j’ai exprimé le désir, au nom de l’Administration Municipale, que les soldats de 1870-71, inhumés dans le cimetière, soient exhumés et réunis avec les combattants de 1914-18.

            Ce serait, -ai-je ajouté -, rendre un hommage égal à tous les enfants de Bolbec morts pour la France.

            Le Conseil adopta, à l’unanimité, ma proposition. Or, dans le Conseil, nous possédons comme membres, un nombre imposant d’anciens combattants 1914-18.

            La presse locale et la grande presse départementale a l’habitude de publier le compte-rendu intégral de nos délibérations et il est probable, sans que je puisse l’affirmer, que ces journaux ont dû reproduire cette délibération.

            Le 3 Août 1928, ayant sollicité et obtenu une subvention de l’état, nous avons donc fait procéder à l’exhumation et réinhumation des anciens combattants de 1870-71.

            Y assistaient :

1° - Monsieur le Commissaire de Police de Bolbec,

2° - Le Maire de Bolbec, Chevalier de la Légion d’Honneur,

3° - Monsieur Deshayes, Adjoint, Officier d’Académie, Secrétaire de l’Orphelinat de Guerre et des Pupilles de la Nation.

4° - Monsieur Régnier, Adjoint, Ancien Combattant, Croix de Guerre.

            Chaque année, depuis environ 50 ans, à la Toussaint, personnellement, j’ai toujours été m’incliner et me recueillir devant les tombes des morts 1870-71. Ayant moi-même perdu l’un des miens, engagé volontaire en 1914 et tué en 1917 au Moulin de Laffaux, je ressens et comprends l’état d’âme des parents et amis de ceux qui sont dans ce cas, et je puis vous affirmer que les personnalités qui m’accompagnaient le 3 août 1928, choisis pour leur haute honorabilité et leur caractère patriotique, ont rendu aux Morts de 1870-71 l’hommage et le respect que l’on doit à ceux qui sont tombés pour la patrie.

            D’ailleurs, depuis que nous sommes à la tête de l’Administration, au 1er Novembre, chaque année, nous avons toujours fleuri les tombes de tous sans distinction, et de grade ou d’année de leur mort.

            Vous pouvez donc, Monsieur le Sous-Préfet, vous convaincre que :

1° - Les opérations de transfert du Général Ruffin et des Morts de 1870-71 n’ont eu d’autre but que de raviver le souvenir et de rendre à tous un hommage égal.

2° - En réparant leurs tombes qui se disloquaient, nous avons voulu que ces héros aient une sépulture digne de leur fin.

3° - Nous avons agi en communauté de sentiments avec les combattants de 1914-18 et aussi avec les rares survivants de 1870-71 qui, à défaut de parents connus et de nous et d’eux, étaient pour l’Administration les « frères » de ceux tombés et inhumés ici.

4° - Il est évident que, si nous avions connu des membres des familles, soit du Général Ruffin, soit des héros de 1870-71, nous nous aurions fait un devoir de les prévenir et un grand honneur de les recevoir à la Mairie de Bolbec.

            Vous voudrez bien, nous vous en prions, affirmer aux membres de la famille Diard, combien, lors de leur voyage à Bolbec, nous aurions été honorés de leur venue à l’hôtel de Ville. Nous aurions pu leur exprimer de vive voix nos regrets de n’avoir pas connu leur parenté avec le soldat Lécuyer, mort pour la France en 1870, et par conséquence, de n’avoir pu leur faire connaître un projet qui, approuvé de tous, n’avait d’autres motifs que de perpétuer le souvenir de héros dans un endroit digne d’eux, et de faire que le culte des ancêtres soit une réalité et un exemple.

            Ci-joint une expédition du procès-verbal d’exhumation et de réinhumation dressé le 3 Août 1928 par le Commissaire de Police de Bolbec.

            Veuillez croire, Monsieur le Sous-Préfet, à mes remerciements sincères et à mes plus dévoués sentiments.

 

Le MAIRE de BOLBEC

Victor DESCHAMPS

Chevalier de la Légion d’Honneur

 

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Mont St Aignan, 30 rue Ed. Fortier

Le 13 avril 1941

 

Monsieur le Maire

 

A la suite d’une visite à nos tombes du cimetière, je me permets de vous signaler l’opportunité d’une petite réparation qui ne prendra pas cinq minutes avec une truelle de ciment à l’ouvrier : il s’agit d’une fente, du fait des gelées, entre la dalle mortuaire et le soubassement, ce qui facilite l’entrée, à l’intérieur, de la pluie, à la tombe de mon oncle Georges Lécuyer, mobile tué en 1870, la plus haute de la rangée à droite.

Ne doutant pas que vous puissiez faire faire rapidement cette petite réparation, je saisis l’occasion de vous remercier du soin pris avec lequel la ville entretient ces sépultures

Et vous adresse l’expression de ma considération distinguée

Avec mes meilleures salutations

 

G. Diard

Professeur au Lycée Corneille

A Rouen.

 

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Le 30 avril 1941

 

Monsieur G. Diard

30 rue Ed. Fortier

Mont St Aignan

 

Monsieur,

 

En réponse à votre demande du 13 avril 1941, j’ai l’honneur de vous informer que la petite réparation dont  vous m’entreteniez a été effectuée quelques jours après, vous pouvez donc être assuré que la tombe de M. Georges Lécuyer est maintenant en état.

Veuillez agréer, Monsieur, l’assurance de ma considération distinguée

 

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1870-71. Les Prussiens à Bolbec, éphémérides du 1er décembre 1870 au 31 janvier 1871, par G.-F. Mauconduit.

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Sources :

Archives communales de la ville de Bolbec (archives militaires 4H)

Mauconduit, G.-F.. 1870-71. Les Prussiens à Bolbec, éphémérides du 1er décembre 1870 au 31 janvier 1871, par G.-F. Mauconduit. (15 février 1896.). 1895-1896.

Recherches Alain TROGOFF

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